La charge mentale des femmes, l’épuisement de tout gérer

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La-Femme (charge mentale des femmes) – un concept émerge depuis quelque temps sur les réseaux sociaux : la charge mentale subie par certaines femmes. Tâches domestiques et administratives, prise de rendez-vous médicaux… Les contraintes envahissent l'esprit pour ne plus le lâcher. Epuisées de penser à tout, ces femmes risquent leur santé psychique et physique.

Et si les femmes étaient une réincarnation de Shiva, le dieu aux multiples bras ? Elles pourraient l'être, tant elles ont de choses à organiser et à faire : leur métier, les tâches domestiques et culinaires, la logistique scolaire, les rendez-vous médicaux, la coordination de l'emploi du temps familial… Leur cerveau est submergé par tout ce dont elles s'occupent !

 

Aujourd'hui, les femmes en couple gèrent 71% des tâches ménagères et 65% des tâches parentales

Le sujet a fait irruption dans l'actualité après la publication sur Facebook de la bande dessinée d'une blogueuse, Emma, intitulée Fallait demander. Partagée des centaines de milliers de fois depuis le 15 mai, cette BD illustre ce qu'une chercheuse a baptisé dans les années 1980 la "charge mentale", ou "charge émotionnelle". Les femmes sont très souvent surchargées et elles disposent de très peu de temps pour elles, voire pas du tout.

Les femmes au foyer ne sont pas à l'abri

"La charge mentale est pour moi aussi physique et physiologique, notamment quand les femmes sont enceintes ou, pour nombre d’entre elles, au moment du syndrome prémenstruel. Il s’agit donc d’une charge globale, commente le Dr Aurélia Schneider, psychiatre. Femme surmenée est un pléonasme ! Au sein d’un couple hétérosexuel, surtout s’il y a des enfants, elle s’occupe de la maison et doit penser à tout, ce que l'homme ne gérera jamais, ou très rarement."

Les femmes au foyer ne sont pas non plus à l'abri de ce surmenage. "Quand elles ne travaillent pas, les femmes n'ont pas d'alibi et elles ne sont pas pardonnées lorsqu’une tâche ménagère n’est pas effectuée." Les hommes sont souvent incapables de comprendre cet épuisement puisqu'ils ne mesurent pas ce que représente la gestion d'une famille et d'une maison. Et même si les jeunes hommes participent davantage que leurs aînés aux tâches domestiques, les chiffres sont clairs : les femmes sont toujours en charge du foyer. Depuis vingt-cinq ans, et d'après les chiffres de l'Insee, les hommes s'occupent un peu plus de l'éducation des enfants, mais leur contribution aux tâches domestiques est restée relativement stable. Ainsi les femmes gèrent-elles 71% des tâches ménagères et 65% des tâches parentales…

Troubles anxieux, maladies de peau…

Parmi ses patients, le Dr Schneider constate que les femmes sont plus surchargées que les hommes et ont davantage de risques de burn out : "Elles sont plus exposées et je les vois plus aussi parce qu'elles verbalisent davantage leurs émotions que les hommes…" Selon la psychiatre, certaines périodes sont plus ou moins difficiles : la naissance d'un enfant, qui rend les femmes plus vulnérables dans le post-partum, ou la ménopause. "La ménopause est redoutable du fait des symptômes physiques très pénibles, comme les bouffées de chaleur, les insomnies… et aussi d’un point de vue psychologique."

L'épuisement n'est pas la forme ultime de la charge mentale. "Par exemple, celle-ci peut provoquer des troubles anxieux, certaines maladies de peau quand les femmes sont trop stressées (psoriasis, eczéma,..), détaille le Dr Schneider. Il y a des signaux d'alerte : du stress, de l'anxiété, un mal de ventre ou encore des migraines." Les femmes devraient être attentives à ces signes et ralentir le rythme avant d'être en burn out.

Des dégâts sur le couple

Ce surmenage produit inévitablement des dégâts sur le couple, les femmes épuisées n'ayant plus le temps, l'énergie et l'humeur propices à la vie intime. La discussion à ce propos est souvent difficile : l'homme se croit agressé et estime que sa compagne n'a qu'à demander davantage d'aide ; de son côté, la femme se sent incomprise et lasse de devoir toujours expliquer ce que son conjoint doit faire. "Schématiquement, les hommes ont du mal à comprendre que leur femme ne soit pas fraîche et disponible le soir, explique le Dr Schneider. Ils ne réalisent pas tout le travail fait par leur femme dans la maison, qui est caché et très ingrat."

La première étape est de prendre conscience du surmenage, selon le Dr Schneider : "Les femmes peuvent faire une liste de tout ce qu'elles font sur trois jours (deux jours de semaine et un week-end), en notant les machines, l'étendage du linge, les courses et la cuisine, les rendez-vous médicaux, les trajets des enfants, etc. Elles se rendront compte de tout ce qu'elles font et aussi du temps que cela aura pris !"

Demander que les hommes s'impliquent davantage dans la logistique est parfois (souvent ?) problématique ; quand le dialogue reste englué et débouche sur des disputes, la consultation d'un psychothérapeute ou d'un thérapeute de couple est parfois nécessaire pour se faire entendre et faire bouger les choses…

Ne pas se comparer ni chercher la perfection

Autres conseils de la psychiatre : il faut gagner en estime de soi, se faire des compliments sur tout ce que l'on fait dans la journée et le faire valoir aux autres (notamment à son compagnon). Se faire un petit cadeau après une tâche ingrate, comme un simple bouquet de fleurs, est un bon moyen de se faire du bien. Le Dr Schneider suggère également, le soir venu, de se remémorer trois actions bien accomplies dans la journée, et de s'en féliciter. C’est un exercice rapide et très utile, à condition de le pratiquer régulièrement et d'oublier les souvenirs négatifs !

Arrêter de se comparer est aussi indispensable. En effet, chaque cas est unique, souligne Aurélia Schneider. La pression de la société est forte sur les femmes, censées assurer dans leur vie professionnelle, personnelle et familiale. Certains traits de caractère accentuent la sensibilité à cette pression. "Il se cache souvent des problèmes d'estime de soi, des exigences internes élevées d'obligation de perfection (comme une maison impeccable, un dîner fait maison…). C'est souvent très fort chez les femmes, cette obligation de tout faire soi-même", analyse le Dr Schneider. Elles craignent le jugement d'autrui et ont tendance à se comparer avec les autres femmes. Or, pour être bien dans sa peau, il faut se détacher de l'objectif de perfection et de la culpabilité qui va avec. Un travail parfois plus facile avec l'aide d'un thérapeute.

S'accorder une journée rien qu'à soi

Les femmes concernées doivent aussi dire ce qu'elles veulent à leur conjoint, même si elles sont lasses de devoir demander certaines choses : "Il ne peut pas savoir ce qu'elles ont dans la tête, martèle la psychiatre. La télépathie n'existe pas, même après un long temps passé ensemble, et même avec un conjoint prévenant ! Alors si elles ont envie d'aller au cinéma, au restaurant ou même d’une rose, ou de toute autre attention particulière, il est indispensable qu'elles le formulent clairement." Bien entendu, le corollaire à cette demande sera un remerciement chaleureux, destiné à créer une ambiance agréable et à donner envie à l’autre de recommencer !

Les femmes doivent également apprendre à dégager du temps pour elles, et uniquement pour elles. "Je prescris aux femmes qui travaillent de prendre un jour de RTT lorsque les enfants sont à l'école, reprend le Dr Schneider. Tout comme je demande aux femmes qui ne travaillent pas de s'accorder une journée en mettant les enfants à la cantine".

Ces conseils relèvent du bon sens, mais les patientes n'y pensent pas parce qu'elles manquent de recul, prises dans un emploi du temps très chargé. Or elles ont besoin d'une "soupape". Cette journée off a de multiples intérêts : déjeuner avec une amie, caser un rendez-vous médical, donc prendre soin de soi, ou tout simplement souffler et prendre son temps.

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